La Cour suprême de l’Ontario (Canada) a jugé que le champion olympique de Pékin Eric Lamaze lui avait soumis de faux documents médicaux justifiant son cancer, dans un procès intenté contre lui par Iron Horses Farm pour une vente frauduleuse de chevaux. Le Canadien est par ailleurs poursuivi dans d’autres affaires toujours en cours par plusieurs de ses anciens associés.

Mis à jour le 23 novembre 2023 : le média The Chronicle of the Horse a dévoilé hier que dans l’affaire de la vente de Nikka vd Bisschop et Newberry Balia NL par Jeffrey Brandmaier et Lorna Guthrie, Eric Lamaze avait été condamné par un juge de Floride le 13 novembre dernier. Cette dernière, Maxime Cheesman, a rendu un jugement expliquant que le Canadien, « bien qu’on lui en ait donné l’opportunité, n’avait pas contesté la motion déposée par les plaignants et n’avait donné aucune raison pour se défendre face à ce dont on l’accusait. » Par conséquent, Eric Lamaze a été condamné à payer 1,390 millions de dollars (soit le prix des deux juments), en plus d’intérêts et des frais d’avocats des plaignants.

Toujours dans cette affaire, la famille Rein, actuelle propriétaire de Nikka vd Bisschop, a demandé à ce qu’un procès se tienne contre le champion olympique. Les propriétaires l’accusent de d’incitation frauduleuse à l’achat (fraudulent inducement), de déclaration erronée faite par négligence (negligent misrepresentation) et d’infraction de la loi floridienne relative aux pratiques commerciales mensongères et déloyales (breach of Florida’s Deceptive and Unfair Trade Practices Act) : le Canadien ne leur aurait pas dévoilé la vérité concernant les parts de la jument détenues par Jeffrey Brandmaier et Lorna Guthrie et les aurait incité à l’achat à l’achat de Nikka sans leur dévoiler la participation de ces derniers. En outre, la famille Rein et les Brandmaier – Guthrie se sont mis d’accord entre eux en septembre dernier par un accord confidentiel pour abandonner les poursuites et contre-poursuites entre eux.

Article original datant du 9 septembre 2023 : C’est une bien surprenante nouvelle que nous apprenait le media canadien Horse Sport mercredi, appuyé par des révélations de leurs confrères néerlandais horses.nl il y a deux jours : Eric Lamaze a été jugé coupable par la Cour suprême de l’Ontario d’avoir soumis des documents frauduleux à la justice pour la duper, dissimulant son véritable état de santé afin d’échapper à des poursuites judiciaires qu’il traîne depuis une dizaine d’années.

Le champion olympique est en effet poursuivi depuis 2010 par Karina Azize-Fredricks (Iron Horse Farm), qui l’accuse de lui avoir vendu trop cher trois chevaux de moindre valeur que prévu. Le Canadien a toujours nié ces accusations mais se retrouve quand même devant la justice : c’est à ce moment là qu’il aurait commencé à utiliser sa maladie comme excuse pour reporter le procès. Selon horses.nl, à partir de 2016, le procès aurait commencé à prendre beaucoup de retard, précisément au même moment où Eric Lamaze a commencé à évoquer un cancer en public. Supposément soigné en Europe, le cavalier a fourni des justificatifs médicaux à la cour canadienne, qui « n’avait aucune raison de douter de la déclaration et des dossiers médicaux du cavalier. »

Eric Lamaze a été sacré champion olympique en 2008, entre autres victoires de prestige. – CHI Genève

Toutefois, les années suivantes, la méfiance a commencé à grandir : bien qu’il ait annoncé souffrir d’une tumeur au cerveau, Eric Lamaze a continué à concourir, alors même que son état de santé ne lui supposément pas la force d’assister au procès et était utilisé pour justifié des reports de procès. Suspicieuse, Karina Azize-Fredricks a engagé un détective privé pour se pencher plus en profondeur sur ses soupçons. De cette enquête est ressorti des découvertes stupéfiantes : deux médecins de ce centre, les docteurs Nordenyn Oulad Ben Taib et Benoit Pirotte, avaient supposément fourni des certificats médicaux expliquant que des tumeurs métastatiques avaient été découvertes à la gorge du Canadien et que son cancer s’était propagé au larynx, nécessitant un traitement contre cette maladie en plus d’une craniotomie pour son cancer au cerveau, nécessitant une convalescence de plus d’un an. Le détective a en réalité découvert des incohérences dans ces témoignages : le premier docteur, indiquant ne parler que français, anglais et arabe, était censé avoir rédigé la lettre en néerlandais et son nom et l’adresse de l’hôpital étaient incorrectes sur la lettre, en plus d’une signature qui n’était pas la sienne ; le second spécialiste a indiqué n’avoir jamais rencontré Eric Lamaze et que la lettre était probablement un faux.

Avec ces révélations, le 28 août, l’avocat de longue date d’Eric Lamaze, Timothy Danson, a préféré se retirer de la défense du Canadien. Lors d’une dernière audience le 5 septembre dernier, il a par ailleurs indiqué qu’Eric Lamaze « était très malade, mais peut-être pas d’un cancer. » Le juge en charge de cette affaire a par ailleurs déclaré dans son compte-rendu que « monsieur Lamaze avait tenté de tromper la cour en fournissant trois lettres contrefaites, qui donnaient un avis trompeur sur l’état de santé dramatique de monsieur Lamaze. Monsieur Morse (avocat de la partie adverse, ndlr) a argumenté que, comme si la tromperie n’avait pas suffi, il avait fallu en plus que monsieur Lamaze feigne d’être atteint d’un cancer au stade terminal, ce qui est une insulte envers tous ceux qui ont souffert d’une maladie si redoutée. Il avait fait ceci seulement pour éviter de rendre des comptes dans cette affaire qui a commencé il y a plus de dix ans mais n’a pas encore été jugée.« 

Finalement, Eric Lamaze a été condamné à verser 32 400 dollars (soit 22 143 euros) à Iron Horses Farm pour couvrir les frais engagés pour faire toute la lumière sur cette histoire de faux documents médicaux. Si sa société Torrey Pines ne paye pas ou échoue à trouver un nouvel avocat pour faire appel de cette décision d’ici le 29 septembre, la loi canadienne les considèrera automatiquement comme coupable, même si Iron Horses devra par la suite justifier le prix des dommages qu’ils ont subi devant la justice canadienne ; il en va de même pour Eric Lamaze lui-même, étant donné qu’il est poursuivi en tant qu’individuel dans cette affaire en plus de Torrey Pines Stables.

Des affaires judiciaires toujours en cours

Si cette révélation a agit comme une déflagration dans le monde équestre, il ne semble pas au bout de ses surprises : Horse Sport révèle aussi que le Canadien est impliqué dans plusieurs autres affaires judiciaires encore en cours, dont trois concernant des chevaux et une propriété équestre. Le premier procès a été intenté contre lui par Robert Chad, propriétaire de Stone Ridge Farm et père de Kara et Bretton Chad, longtemps coachées par Eric Lamaze. Les deux s’étaient associés en 2015 pour acheter la propriété de Torrey Pines South, en Floride, pour 8,25 millions de dollars. Une fois la transaction achevée, Robert Chad prétend avoir racheté la part de Lamaze en octobre 2020 pour devenir le seul propriétaire des écuries. Seulement voilà, après avoir reçu la somme correspondant à ses parts, l’ancien pilote d’Hickstead aurait refusé de signer les papiers actant ce changement et de fournir les documents relatifs à la gestion des écuries, notamment l’acte de propriété et le livre de comptes d’où 1 million de dollars seraient manquants.

Robert Chad a par ailleurs déposé plainte contre Eric Lamaze dans la transaction supposément frauduleuse de Bright, un KWPN acheté par Stone Ridge Farm à Ashford Farm par l’entremise du Canadien pour son élève Bretton Chad, pour la modique somme de 625 000 euros : l’olympien aurait reçu une commission de la part des vendeurs sans que les acheteurs ne le sachent, sans quoi le prix d’achat aurait été plus bas. Ce qui a aussi motivé la plainte sont les performances de Bright, vendu comme un cheval d’avenir pouvant évoluer à haut niveau, mais finalement sans succès : revendu pour 8 000 livres à une cavalière britannique, il a fini sur des épreuves en 110 et 125, soit loin des capacités qu’on pouvait lui prêter au moment de l’achat, selon la plainte de Robert Chad.

Enfin, une dernière plainte a été portée par ses anciens associés et copropriétaires Jeffrey Brandmaier et Lorna Guthrie, dont la mère a soutenu Eric Lamaze au début de sa carrière. Les deux plaignants accusent de les avoir trompés dans l’achat et la vente de Newberry Balia NL et Nikka vd Bisschop, achetées jeunes par le biais du Canadien pour être valorisées par lui-même et son équipe dans le but de les revendre. Dans le premier cas, le pilote d’Hickstead aurait détourné 103 000 dollars de la somme totale, les plaignants ayant déboursé 326 000 dollars quand le prix d’achat fixé par les acheteurs était de 223 000 dollars. Même scénario pour Nikka vd Bisschop, avec des sommes encore plus élevées : la jument ayant été achetée à 556 000 dollars, chaque co-propriétaire avait déboursé 278 000 dollars pour détenir 50% de Nikka, mais le prix initial était en fait estimé à 441 000 euros ; chaque part aurait donc dû revenir à 220 000 dollars, ce dont Jeffrey Brandmaier et Lorna Guthrie n’avaient pas connaissance.

Par ailleurs, l’affaire se complique avec la vente d’une partie des parts de Nikka à la famille Rein, fidèles sponsors d’Eric Lamaze : les nouveaux co-propriétaires auraient déboursé 525 000 dollars pour s’offrir 50 % de la jument, laissant 25 % à Guthrie et Brandmaier et 25% à Lamaze. Néanmoins, selon les plaignants, ils n’ont jamais vu la couleur de cet argent qui aurait été récupéré et dépensé entièrement par Eric Lamaze. De plus, une fois passés les championnats du monde de Herning où Nikka a couru sous la selle de Beth Underhill et a donc pris de la valeur, Eric Lamaze aurait vendu 45% de ses parts et de celles de Guthrie et Brandmaier à la famille Rein pour 2,27 millions de dollars, gardant 5% de possession de la jument pour lui-même et ne versant pas la somme de 1,495 million de dollars qu’il devait aux plaignants : cet argent aurait été utilisé pour payer des factures médicales et acheter de nouveaux chevaux.


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