Situé au cœur de l’Auvergne, à Arlanc (63) dans le cadre enchanteur du Livradois Forez, l’élevage de Claire Faveyrial et Marian Pelardy produit depuis quelques années les champions de demain. Pourtant, l’élevage n’est pas une chose aisée à mettre en œuvre : choisir les bons étalons et les bonnes juments, savoir s’occuper de la gestation et du bien-être des futures mamans, de leur progéniture, les laisser grandir en étant bien dans leurs sabots… Tout un art dont Claire nous dévoile les petits secrets dans cette interview !
Info Jumping : Comment en êtes-vous venue à faire de l’élevage ?
Claire : « Passionnée de chevaux depuis toute petite, j’ai commencé à m’occuper d’eux et à monter à l’âge de 6 ans. J’ai intégré en 2008 le lycée agricole d’Yssingeaux dans la filière équine, malheureusement des problèmes de santé me ralentissent concernant la capacité de continuer de monter à cheval. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot ! Je continue de travailler des chevaux à pied, j’en sauve du mauvais camion que je remets en état, retravaille et revends pour le loisir, je fais aussi quelques pensions pour des chevaux d’amies.
En 2016, je décide de faire un poulain à ma jument de cœur qui est une Frisonne et là, c’est une révélation ! M’occuper de ce petit poulain me rend heureuse. Finalement mes soucis de santé ne m’empêcheront pas de faire de ma passion mon métier. C’est donc avec l’argent mis de côté avec le sauvetage de réformés que je peux m’acheter mes premières poulinières et commencer doucement mais sûrement à faire naitre. »
Comment votre activité a-t-elle débuté ?
Outre l’achat de premières juments, j’ai aussi eu la chance d’avoir des propriétaires qui m’ont fait des cadeaux en me laissant leurs juments à bas prix ou en confiage. Certains me contactent d’eux-mêmes pour me proposer leur jument à la retraite sportive. Encore aujourd’hui, c’est une de nos spécialités, il y a une minorité de propriétaires qui ne cherche pas l’argent en vendant leurs compagnes de route à la retraite mais préfèrent les envoyer là où ils seront choyés. Il est donc de notre devoir de faire du mieux qu’on peut pour montrer qu’ils ne se sont pas trompés !
J’ai également une phrase que je répète souvent aux propriétaires : « Même si sur le papier les chevaux sont notre propriété, leurs cavaliers restent les personnes qui les connaissent le mieux. » Ceci fait donc que si j’ai besoin d’un renseignement, hors grosse urgence, je me tourne vers les anciens propriétaires qui peuvent m’apporter certaines réponses concernant la santé ou le comportement de leurs juments.
On pourrait dire que j’ai choisi de faire naître par dépit à cause de ma santé mais je dirais plutôt que c’est par passion, car à ce jour je préfère travailler un cheval à pied, en main, pour l’éducation par exemple, car cela reste la base de tout ! La majorité des retours clients que nous avons eu témoignent de poulains faciles pour la suite de l’apprentissage. Monter n’est pas ma priorité !
Les fondements de l’élevage sont pour moi : la passion, ne jamais rien lâcher, qu’il existe toujours une alternative qui finalement réussit plus que l’idée première, et la confiance accordée par des personnes inconnues que je ne remercierai jamais assez !
Quel est son but et ses objectifs à court et long terme ?
Comme tout éleveur, notre but est de faire naître un crack ! Mais déjà avoir des chevaux et poulains bien dans leur tête est primordial. Des objectifs… on en a plein ! Et nous en avons toujours des nouveaux qui arrivent. Paris ne s’est pas fait en un jour comme on dit, nous espérons une grosse nouveauté pour 2024, c’est un objectif à court terme pour nous, les prochaines semaines nous le dirons. Nous chercherons toujours de la nouveauté et donc de la qualité. Nous avons une clientèle extérieure à servir, il faut savoir renouveler les reproducteurs, c’est donc pour cela que nous essayons d’avoir un nouvel étalon tous les ans ce qui s’apparente à un objectif à long terme.
Quels sont les étalons de l’élevage ? Qu’est-ce qui vous plait chez eux ?
Nous avons Ulpien d’Elle (Quick Star x Jalisco B), Nippon d’Elle (Sherif d’Elle x Narcos II), Versace (Caretino x Landgraf I) et Liandero (Libero H x Silbersee). Nous sélectionnons les étalons sur performance, mais surtout pour le mental. Nos quatre étalons actuels sont de vrais gentils. Tous leurs poulains nés chez nous jusqu’à ce jour ont vraiment été faciles pour beaucoup de choses. Les retours que nous avons de nos clients font toujours plaisir !
Comment sélectionnez-vous vos poulinières ?
Il n’y a pas eu réellement de sélection au début car nos premières poulinières sont issues de sauvetages et, par chance, la plupart ont d’excellentes origines ou un très gros potentiel, voire les deux réunis pour certaines. Aujourd’hui, nous regardons un peu plus les papiers pour éviter de tourner en rond sur les origines, l’éventuelle production pour certaines, les sorties en concours pour d’autres ou encore le modèle. On ne trouvera jamais la jument parfaite, à nous de corriger les défauts en faisant le bon croisement : par exemple, nous venons de récupérer une jument « sauvetage » avec de très mauvais aplombs ; avec des croisements intelligents, elle a produit deux étalons, nés origines constatées dont un qui a rejoint le studbook du Selle français !
Sur quels critères vous basez-vous pour créer les bons mariages entre juments et étalons ?
Le meilleur étalon du monde n’est pas forcément celui qui conviendra à nos juments. En premier, nous évitons la consanguinité. Ensuite, nous pensons à un mariage tout en sélectionnant l’étalon sur ses performances, et de là nous nous penchons plus précisément sur ce qu’il y a à corriger sur la mère, ce que le père peut apporter, et inversement. Nous regardons également le tempérament. Nous essayons de nous renseigner sur les éventuels produits des étalons ou sur des croisements similaires.
Quels sont les traits de caractère privilégiés pour les futurs poulains ?
Sans aucun doute, un poulain bien dans sa tête ! J’entends par là un poulain qui n’est pas peureux et pas stressé, avec qui on peut avancer dans le travail de sensibilisation et désensibilisation même si celui-ci a son petit caractère, il en faut aussi ! Les gènes des parents y jouent pour beaucoup, certes, mais je fais partie des gens qui pensent que l’environnement aussi : un poulain élevé dans un environnement stressant peut devenir craintif même si ses gènes ne l’y prédisposent pas, et inversement. C’est pour cela que j’aime bien tenter des croisements qu’on pourrait penser incompatible parfois, et jusque là ça a toujours réussi !
Quels sont les projets de développement de l’élevage ?
Nous avons un projet professionnel en cours mais pour le moment nous gardons le secret. Si ce projet se concrétise, alors nous pourrons repenser au projet matériel et donc re-moduler nos bâtiments. Puis en élevage il y a toujours des mini-projets de développement, en ce qui nous concerne pour le moment c’est d’améliorer notre quotidien pour faciliter notre travail. »
Pour le mot de la fin, quel est le poulain/pouliche dont vous êtes la plus fière ?
J’Adore du Pti’Pont. À peine avons-nous su que sa maman Quiniela Bois Margot (L’Arc de Triomphe x Dollar du Murier) était pleine de Vagabond de la Pomme, je savais que le produit resterait à la maison. L’intuition féminine ou mon inconscient qui s’est opposé à ma conscience, on ne saura jamais mais c’est sans regret et avec fierté que je la garderai à mes côtés ! Malgré de grosses propositions alléchantes, qui ont commencé aux championnats de France, j’ai toujours dit non!
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